La croisière Samus
C'est qu'il était énormément attendu, ce nouvel opus de la série Metroid Prime. Annoncé en 2017 au défunt E3, Metroid Prime 4 a vu sa production rebootée deux ans plus tard car en deçà des attentes de Nintendo. C'est presque 20 ans après le troisième épisode que Metroid Prime 4 : Beyond parvient enfin à sortir. En deux décennies, le paysage a beaucoup changé avec l'avènement de la scène indépendante, très friande de l'héritage de la saga. Ce pionnier du genre peut-il rivaliser face à autant de nouveautés ?
L'histoire

Ce nouveau monde abritait une civilisation aujourd'hui éteinte, les Lamorn, dont la compréhension vous offre le moyen de retourner chez vous. Aux commandes de Samus, vous voilà prêt à arpenter ces terres, des jungles terribles aux volcans grondants, en passant par les plaines glacées et les déserts ennuyeux à souhait. L'exploration de Viewros repose ainsi presque intégralement sur l'étude des vestiges Lamorn à l'aide de votre scanner, leurs technologies et les traces qu'ils ont laissées derrière eux. Les éléments narratifs vous sont donnés au compte-goutte, en récompense de votre avancée. Un gimmick bien connu, et ici utilisé comme colonne vertébrale de la progression, tant et si bien que vos péripéties sont quasiment intégralement rythmées par cette civilisation disparue.

Metroid Prime 4 : Beyond a beau s'essayer à des poncifs narratifs forts, l'intrigue reste très naïve. C'est parfois la patte recherchée dans une licence Nintendo : un ton à l'ancienne, où les plans de caméra montrent sans subtilité les éléments d'intérêt, et où les personnages vous expliquent très factuellement comment réaliser une action. Son scénario juste fonctionnel est très didactique dans sa mise en œuvre. Le problème, c'est que dans ce schéma, la présence de Sylux finit par se diluer. Évidemment, son ombre plane sur votre chemin, mais concrètement, que fait-il là si ce n'est justifier un antagoniste ? Tant bien que mal, il essaye de passer une tête pour ne pas se faire oublier, mais son existence reste complètement anecdotique. Sans entrer dans les détails, cet équilibre très bancal se termine malheureusement sur une fin de jeu totalement anticlimatique.

De son côté, et pour faire court, Samus a l'air un peu bête sous son casque high-tech. Sans une once d'instinct de survie, et même si ça lui a réussi pendant 40 ans, elle ne peut s'empêcher de se greffer des technologies inconnues. Un trait presque devenu une tradition, mais qui peine ici à susciter autre chose qu'un haussement de sourcil. Pour cette aventure, elle n'est cependant plus seule. D'autres soldats de la Fédération ont eux aussi été transportés sur Viewros. Si Samus n'a pas le don de parole, vos compagnons, eux, l'ont... beaucoup trop. Metroid Prime 4 : Beyond est extrêmement bavard, que ce soit pour raconter leur inintéressante vie ou pour commenter l'environnement. La palme revient à MacKenzie qui, pour votre malheur, dispose d'un talkie-walkie afin de vous parler en permanence.
Le principe
Votre monture pour braver le désert.

Globalement, le titre jongle entre phases de recherche, de combats – avec un système de visée fastidieux – et de plateformes. Samus peut évidemment se transformer en boule, dont certaines capacités se montrent tout aussi fastidieuses que la visée, afin de se faufiler dans des chemins étroits. Ces séquences mènent souvent à de la plateforme vue de côté, à l'instar des Metroid classiques, comme pour rappeler ses racines. Le monde se découpe en quatre lieux distincts s'articulant autour d'un ennuyant hub en monde ouvert, avec votre objectif final en son centre. Toute l'aventure s'articule alors autour d'une très grande quantité de compétences à débloquer au fur et à mesure, ainsi que de petites améliorations secondaires. Sur le papier, l'ensemble coche toutes les cases du Metroidvania.

Pourtant, une sorte de dissonance semble s'échapper du concept même de Metroid Prime 4 : Beyond. Retro Studios, les développeurs de ce Metroid Prime, semblent ne croire à aucun instant à leur gameplay. Le jeu vous prend par la main à tout moment, tout en parvenant paradoxalement à vous perdre au milieu de son arsenal gargantuesque. L'accumulation de compétences ne rime jamais vraiment avec autonomie. Metroid Prime 4 semble ne pas se comprendre lui-même. Au cœur de son concept, l'exploration est constamment freinée par le jeu qui vous rappelle sans arrêt votre objectif, comme si Retro Studios avait peur de vous perdre. À un moment donné, il va pourtant falloir commencer à faire confiance à ses joueurs et joueuses, surtout dans un genre qui repose précisément sur l'errance et la découverte.

Heureusement, le fil rouge principal reste rythmé avec finesse et demeure un plaisir à parcourir, même si votre aventure se fait sans trop d'encombres. À l'antithèse d'un Hollow Knight : Silksong sorti récemment, Metroid Prime 4 s'apparente davantage à une version pour enfant du Metroidvania, où la liberté est constamment contenue. Au milieu de ce beau monde, la présence d'une zone en monde ouvert que personne n'avait demandée accapare beaucoup trop de temps de jeu. Des terres complètement arides et vides à parcourir en enfourchant sa moto, comme un passage obligé. Il serait peut-être temps d'arrêter cette manie de devoir cocher la case open world sur sa checklist.
Pour qui ?
Les boss sont un peu plus difficiles à vaincre que le reste du jeu.
L'anecdote
Je n'aime pas le sable, il est grossier, agressif, irritant et s'insinue partout...
- Le retour de Samus Aran fait toujours plaisir
- Le rythme de jeu agréable
- Les partitions musicales mémorables
- Beaucoup trop bavard
- Le biome désert ennuyeux au possible
- Un ventre mou après les deux-tiers de jeu
- Un antagoniste inexistant et sans charisme
Metroid Prime 4 : Beyond est un jeu extrêmement bancal. Le titre se parcourt avec plaisir, avec un ventre mou sur son dernier tiers. Retro Studios semble ne pas trop savoir où donner de la tête, entre un terrain de jeu ouvert et une narration qui vous force à jouer sur des rails au détriment de son concept. Sans être de la paresse en vous faisant aller et revenir dans les mêmes décors, ce Metroid Prime se conjugue à maintes reprises avec frustration. C'est aussi sans oublier certains gros points noirs : une zone en monde ouvert inintéressante, des PNJ beaucoup trop bavards, et un antagoniste inexistant.